A PARIS, TU RIS PAS
C’est lundi. Aujourd’hui j’ai pris la résolution d’arrêter de faire ma tête de cochon. De me lever du bon pied, avec ou sans café, de ne pas jeter de regard noir à mon homme à chaque fois qu’il occupe les chiottes de la salle de bains. De ne pas pester contre le voisin du dessus qui joue de la gratte avec ses pieds et de ne pas en vouloir au monde entier parce que je dois me lever, me réveiller de cette douce torpeur dans laquelle j’étais si bien, si bien…
Je sors de l’appartement, un franc sourire plaqué aux lèvres, et je descends jusqu’à l’arrêt du bus 81. Vingt deux minutes d’attente. Vingt-deux. Putain mais qu’est-ce qui se passe encore ! Au loin je vois cligner de leur lumière agaçante les gyrophares. Un accident. Moi qui voulais être cool aujourd’hui, c’est raté. Je respire une goulée d’air et m’enfonce dans ce trou noir tant haï, le métro. La ligne 13 est une des pires lignes qui soient, ça n’arrange pas mes affaires. Je vais essayer de pas faire la gueule, mais je râle intérieurement. C’est à peine supportable, avec ces néons agressifs, les gens qui me bousculent et qui me frôlent, seulement à quelques millimètres de mon corps en ébullition. Stupides, hagards, on se retrouve en troupeaux serrés dans un écheveau de fatigues humaines. Les yeux sont mornes, tristes, tandis que mes écouteurs diffusent l’Hiver des 4 saisons de Vivaldi. J’écoute avec une sorte de jouissance violente, comme si ce mouvement raisonnait en echo de mon chaos intérieur.
A la fois lasse et soulagée, je sors du métro en me faisant la réflexion que les gens ne peuvent pas être si noirs, qu’il faut que je me force à être un peu sympa, moins égoïste et tournée vers mon petit cauchemar personnel et dérisoire. Accepter l’autre, accepter la promiscuité, voilà la clé. C’est sûrement ça qui me réconciliera avec le monde. Après tout, je ne suis pas obligée de faire comme tous les Parisiens à la mine grise et au teint pâle, dont les seules valises, symboles d’un voyage qui se limite à l’intra-muros, sont des attachés-cases ou des ombres sous les yeux.
Comme je deviens aigrie, comme eux, je deviens méfiante, haineuse, et je pers mon sens de l’humour. Avant, j’avais ce détachement qui me permettait le haussement d’épaules fataliste de qui sait apprécier sa ville avec ses défauts, ses tares, ses travers. Maintenant, je l’aime et je la déteste. Je l’aime par ce qu’elle est belle, et en cela je retombe du côté superficiel et de l’apparence. Et je la hais parce que ses intestins me digèrent et me bouffent. Les amibes qui y pullulent sont devenues des ennemis qu’il faut cataloguer, critiquer, détester. C’est dans ces moments-là que me viennent à l’esprit toute l’ampleur et la pertinence de l’expression "humeur massacrante".
11 commentaires:
La grisaille parisienne t'envahit !! Mais ce texte est un bon début de réaction.
Je n'ai jamais vu de gens à la mine plus maussade que ceux de Paris.
Allez courage, c'est toujours dur après les vacances.
C est dure le retour apres le ski!!
Dans une semaine tu seras redevenue parisienne!
La vie parisienne, ça a l'air d'etre vraiment particuler....
Cette grande ville de stress, d'angoisse, de pollution, grise et morne..où juste la vitesse et l'urgence existent..... je ne m'y sentirais certainement pas bien à vous écouter en parler......
Alors, déjà, change de musique... pour se détendre, rien ne vaut les suites pour violoncelle de Bach... là, avec ça dans les oreilles, tout va mieux :)
PS: Et pis, ce serait dommage de perdre ton sens de l'humour, c'est que je l'aime bien, moi!
j'ai quitté Paris, mon plus bel amant parce que ses inconstances m'ont fait prendre l'eau...
*joli texte Mlle* :)
Venez habiter sur orléans vous deux! Très joli dessin, quoiqu'un peu déprimant. En plus de tes jeux de mots,j'aime tout autant ton jeu de crayon.
Diane, Lio, cheub > arf c'est l'effet après-ski. Je dois être maso car je ne peux me résoudre encore à quitter la capitale...
Doune, quelle bonne idée, je possède en effet les suites dont tu parles mais jouées à la viole de gambe, c'est plus snob ;°)
Lunaba > une telle distinction de la part d'une écrivaine aussi douée me touche beaucoup...de pâle, je passe au rose ;°) Merci
Dark > Tu sais, en dehors de ses airs un tantinet bourgeois, j'ai bien aimé Orléans, je me souviens même l'avoir dit à Oken, qui lui en a carrément marre de Paname;°) C'est vrai que mon dessin est déprimant, mais ce n'est qu'humeur du moment, et comme toute humeur est passagère...de plus comment perdre totalement mon sens de l'humour avec vous amis-bloggers ? Impossible !!! Chassez le naturel, il revient au trot :°)
Paris ça pue.
Paris : l'épreuve !
Paris perdus...
Orléans, c'est évident! ;p
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