lundi 27 décembre 2010

40 Street Artistes Au Carré

Le livre qui "40 Street Artistes Au Carré" est né d'un challenge à l'ère du 4.0. Henri Kaufman, passionné d'art et toujours à la pointe des nouvelles technologies, crée le Miss.Tic Fan Club en 2005. C'est dans ce cadre que je fais sa rencontre. Ayant lu mes textes sur ce blog, il me propose d'élaborer un recueil en combinant nos passions communes au carrefour du Flashcode, du Street Art, de la Photo et de la Poésie.

Après 11 mois de travail, il en ressort un panel d'oeuvres tout aussi étonnantes qu'inventives sous forme de performances, de dessins, de photographies ou encore de peintures murales. Plus qu'un recueil figé, ce livre interactif est une véritable galerie numérique. Il est à la fois une extension de la rue et un lieu de culture où chacun pourra se plonger, grâce à cette passerelle intemporelle qu'est le Flashcode, dans l'univers sans cesse réactualisé des 40 Street Artistes qui m'ont accompagnée dans cette aventure.

Pour vous donner un avant-goût, voici d'abord ci-dessus la couverture à rabats de ce livre de 100 pages légèrement plus grand qu'un format A5, comportant mes textes et les contributions en noir et blanc des artistes ANIS, MICHEL BATLLE, PHILIPPE BAUDELOCQUE, BEPLUS, CALIGR, THOMAS CANTO, ENDER, ESPER, DJA'LOUZ, FKDL, GREGOS, JADIKAN, JANA & JS, JB, JBC, KAN, KANOS, KOUKA, LA MOUCHE, LEIDYLEI, LILIWENN, MAPE, MIMI LE CLOWN, ALICE MIZRACHI, MONSIEUR QUI, NEOK, RAPHAEL, PIXAL PARAZIT les PPA SHAKA & NOSBE, SAÏR, SLY2, SNEZ, SURIANI, SOWAT, SWING, et les TSF PAPY, MILOUZ & KOTEK.
Merci à eux, à HENRI KAUFMAN de m'avoir proposé l'idée d'écrire ces 40 textes illustrés, à EMMANUELLE INTINI pour la magnifique réalisation du livre et enfin XAVIER WARGNIER des Editions KAWA pour sa confiance.

Le livre sera disponible début janvier 2011, vous pouvez le précommander ici. Le code promo XAV40AR vous donne droit à -5%. Je vous propose d'en lire l'introduction, que j'ai illustrée de ce dessin, autoportrait réalisé au bille feutre et au crayon à papier (j'ai utilisé Photoshop pour y intéger le Flashcode qui renvoie à ce blog).


Le Code et Le Labyrinthe

L’un mène au chemin de virtuels antipodes
Quand l’autre brouille la piste de ceux qui l’empruntent…
L’image du premier se compose d’un code
Tout aussi tortueux qu’un sombre labyrinthe.

Damier court-circuité ou échiquier de mots,
Si sa clé nous échappe on reste sur le carreau.
Sous cette mosaïque faussement prosaïque
Le message est secret si l’on zappe sa logique !

On peut tout simplement le trouver esthétique,
En imprimé pied-de poule il fait un beau textile :
Car son texte a du style pour qui maîtrise la grille…
Soyez cruciverbiste pour en capter l’éthique !

Des casiers judicieux en tissent le langage
Encadrés noirs et blancs du tout et son contraire.
Un émail pour des mots dont l’octet s’envisage
Comme une note en cube sur une portée binaire.

Surfant sur la vague de la sérendipité*
On trouve bien souvent ce qu’on ne cherche pas,
Et l’on cherche en vain ce que l’on ne peut trouver
Retenus par ces liens où d’autres âmes sont là :

Au détour d’un clic, d’un site, c’est devenu un tic,
Comme dans ce jeu d’enfant où l’on projette un bic
A partir d’un point noir sur une feuille de papier,
Les connexions affluent entre des étrangers,

Qui sans doute autrement ne se seraient croisés…
De mots de passe en réseaux l’homme dématérialise
Son rapport à autrui et choisit à sa guise
De passer du fantasme à la réalité…

Le code photographié n’est pas sans rappeler
Le flou de l’anonyme, d’une tête pixellisée…
Il en est donc ainsi de ce code unique
Qui mène dans cet ouvrage à des lieux artistiques.

Les sociétés humaines sont régies par des codes
Allant jusqu’aux objets qu’elle tatoue de ses nombres
Et si l’art s’en empare, à chacun sa méthode
Pour y représenter ses clartés et ses ombres.


*Le mot sérendipité est en français un néologisme dérivé de l'anglais « serendipity », un terme introduit en 1754 par Horace Walpole pour désigner des « découvertes inattendues ». A lire : Les Carnets de Sérendipité par Henri Kaufman !:)

mercredi 29 septembre 2010

DOGGY BAGUES, KESAKO ?
OOOOOOOOOOOOO
J’avais déjà il y a quelques années (!) parlé sur ce blog de ma collection de bagues et de la symbolique du majeur levé.
Henri Kaufman fait du 2 en 1 puisqu’il m’a demandé de m’exprimer sur ce que représente pour moi le fait de mettre telle ou telle bague à un doigt donné. Je me suis donc intéressée à fond à ce sujet passionnant, puisant dans la documentation qu’Henri m’a donnée et sur Internet. J’avais dit en plaisantant à Henri que le jour du tournage de la vidéo je viendrai avec mon «doggy bagues»…et je ne croyais pas si bien dire !

C’est avec surprise que j’ai découvert que le mot « bague » est un dérivé de bagage (cf. bag = sac en anglais). Mot qui n’est d’ailleurs pas à confondre avec son homophone « baguage » qui consiste notamment à mettre des anneaux aux pattes des dindons. Ce qui intéresse particulièrement Henri, c’est de savoir ce qui se cache derrière la symbolique des bagues et dans quelle mesure elles peuvent trahir l’état d’esprit d’une personne, son humeur du moment, ses préoccupations, voire les rapports de séduction qu’elle entreprend avec les autres, de manière plus ou moins consciente…

Tout le monde connaît la signification de l’alliance, ce cercle sans début ni fin qui symbolise la pérennité d’une relation. Porté de tous temps à l’annulaire gauche par les mariés, il renverrait à la veine qui mène au cœur selon les anciens Grecs, puis les Romains (vena amoris). Le succès de l’anneau «Trinity» (3 anneaux) lancée par Cartier et créée par Jean Cocteau s’explique par le fait qu’elle est une forme de matérialisation de la "sainte trinité" rappelant le salut ecclésiastique (index, majeur, annulaire levés).

J’ai trouvé toutes sortes d’interprétations selon les bagues et leurs usages : par exemple les bagues au pouce seraient plutôt portées par les gays. Au 19ème siècle, le port d'une bague portée à ce doigt par une femme signifie qu'elle soutient le mouvement féministe. Les féministes se faisaient souvent faire le portrait en portant ostensiblement une bague au pouce. Les bagues au pouce seraient un signal que les porteurs veulent se distinguer de la masse. Ce qui est certain, c'est qu'à l'origine dans le milieu gay hard, elle symbolise le port d'un cockring.

Elles seraient portées à l'index par les esprits «cartesiens» et les «meneurs», au majeur (medius), les «calmes» et «émotionnellement vulnérables», et à l'annulaire par les «conviviaux». S’agissant de l’auriculaire, plusieurs significations sont données. Les francs-maçons portent leurs bagues à ce doigt. Le design de ces bagues est souvent inspiré des "bagues surprises" du 17e siècle. Celles-ci étaient dotées d'un petit logement recouvert d'un opercule à charnière permettant de dissimuler un objet magique ou un autre petit objet témoignant de l'appartenance à une société secrète. Les chevalières sont des bagues à armoiries portées à ce doigt-là par les nobles anglais.

A la fin du 18e siècle vient s’ajouter une autre nouveauté: les bagues dites à regard dont les pierres forment une sorte d’acronyme. Lues dans un certain ordre, les premières lettres des pierres forment un mot : Lapis-lazuli, Opale, Vermeil (autre nom du grenat) et Emeraude suggèrent le mot “LOVE”. Je ne connaissais pas ce système mais ça me donne un nouveau prétexte pour m’acheter une new bague ! Il ne me reste plus qu’à en trouver une avec Citrine, Hématite, Rubis, Iolite, et une pierre ou un métal qui commence par X pour faire Chrix mais j'ai pas trouvé ;-)

De manière prosaïque, quand une bague me plaît, au moment de l’acheter il ne reste pas toujours toutes les tailles alors je la mets où je peux, du moins où va ma préférence c'est-à-dire soit annulaire soit majeur. Il m’arrive rarement de mettre des bagues à l’index ou à l’auriculaire, et jamais au pouce elles me gênent (sans doute parce que dans le cas de l’auriculaire et le pouce, ces deux doigts étant chacun à l’extrémité de la main, les recouvrir c’est un peu se refermer et j’ai besoin de sentir mes mains libres d’un côté comme de l’autre). C’est donc plus une question de confort que de signification…Je mets rarement 2 bagues à une main (sensation d’encombrement) et si je le fais, jamais sur 2 doigts qui sont côte à côte. Pour la pierre, c’est la couleur de mes vêtements et de mon maquillage. Ce sont donc des considérations purement esthétiques qui déterminent mon choix !
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Les explications en live filmées par HK :
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Les vidéos de PPC & HK sont disponibles sur les sites respectifs de ces messieurs, et offrent un regard éclairé en 7 questions/7 minutes sur des sujets aussi variés que la façon de récupérer son ex, réussir une bonne poignée de mains ou gérer son stress au bureau ! Regardez-en une chaque matin, ça vous fera commencer la journée avec le sourire !

lundi 13 septembre 2010

Locus Solus
(2)

J’avais prévu de visiter Brighton le lendemain de notre expédition à Owling Manor, mais je ne pouvais rester sur ma faim. L’image du vieux piano au beau milieu de cette ferme vide me hantait. J’avais dit à Andrée combien ce serait génial de la filmer en train de chanter et de la photographier en Barbara Hendrix dans ce lieu décalé, et elle était d’accord avec moi : il fallait y retourner ! Levées à 6 heures, arrivées vers 9, nous avions toute la journée pour nous amuser dans la campagne anglaise.



C'est sous un soleil éclatant que nous sommes arrivées à Owling Manor. L'exploration a commencé par le jardin, où la nature a parsemé le terrain de multiples herbes folles et plantes de toutes sortes.



Ce petit bassin m'a frappée par la quasi régularité des 8 arbustes poussant autour. Ils donnent un semblant d'ordre dans ce fatras de verdure.



La façade en briques rouges de la maison est ornementée de trèfles sculptés.



Vue du toit.



La première vue que l'on a en entrant dans la maison est cet escalier où subsiste encore un tapis rouge et un puits de lumière de forme ovale.



Les vestiges d'une vie passée sont disséminés dans les pièces au gré du passage des visiteurs qui, comme nous, s'en donnent à coeur joie, déplaçant les objets au gré de leur envies. Ici, le tag "LIAR" est le seul de la maison. Il est d'autant plus étrange de le trouver ici, car son double-sens est bizarrement pertinent. En anglais "liar" signifie à la fois "menteur" et "allongé", et renvoie tour à tour vers le mensonge de la mise en scène et la dormeuse imaginaire qui a laissé ses escarpins au pied du lit...



Dans la chambre d'à-côté, le désordre ambiant se reflète dans le miroir d'une large armoire.



La cuisine n'a rien à envier au reste des pièces encombrées de nombreux objets d'un quotidien révolu, et dont la troublante présence semble nous impliquer dans une proximité, une intimité presque dérangeante tant elle est poussiéreuse et ébréchée.

Il ressort de mes recherches que le manoir appartenait à un couple franco-hispano-anglais. Le propriétaire, fils d’une duchesse espagnole, est né en 1913 en France. Il épouse une anglaise en 1957 à Londres.



Potier, il était également peintre. Sa femme cultivait diverses espèces d’orchidées au manoir. Quant à la maison, elle daterait de 1904.



Pour une raison ignorée, elle fut abandonnée par ses occupants avec tout son contenu (peintures, vaisselle, meubles, vêtements, etc…). Comme si un drame soudain ou une lubie avait forcé le couple à partir sans même faire ses valises...

La maison et son terrain sont actuellement en vente pour une somme de 3 millions de livres et selon des sources non confirmées, la propriétaire qui serait toujours vivante aurait 104 ans ! Le couple n’ayant pas eu d’enfants, le manoir revient à une nièce bien négligente.



Parmi tous les objets, livres, prospectus qui traînaient, j’ai trouvé une édition française de 1932 des Impressions d’Afrique de Raymond Roussel (1877-1933). Elle m’attendait je crois. De son temps Raymond Roussel était un écrivain décrié et incompris. Admiré des oulipiens et des surréalistes, il aimait particulièrement manier la «langue des oiseaux», autrement dit l’homophonie. Pour l'anecdote, il y a un double-sens dans son titre : les «Impressions d’à fric», furent publiées à compte d’auteur. Dans la perspective de vous livrer les miennes, j'ai emporté celles-ci avec moi comme souvenir.


Message d'accueil...

Il nous restait à Andrée et moi une dernière chose à faire avant de partir. Retourner à la ferme abandonnée.



Voici le vieux piano tel que nous l'avions trouvé la veille, vers 20 heures. A l'heure où nous y sommes retournées le lendemain, autour de 15 heures, il était plongé dans l'obscurité. Il nous a fallu une bonne demi-heure pour le déplacer de quelques mètres et ainsi gagner en luminosité. Le pauvre piano était tellement en miettes que nous avions peur qu'il ne se transforme en tas de poussière.



Mais nous étions suffisamment motivées pour marquer la note finale de cette aventure, sachant que nous ne reviendrions pas de sitôt dans cet endroit. Dans sa robe de velours, Andrée, en chantant là ses plus belles arias classiques, a redonné en quelque sorte une seconde vie au vieil instrument dont la voix s'était tue depuis bien longtemps. Dans cette campagne anglaise silencieuse, l'"Urbex Singer" avait encore fait une touche !

samedi 4 septembre 2010

OWLING MANOR
(1)

Londres, 30 août 2010. Mon amie Andrée et moi partons ce jour-là à la découverte d’un étrange manoir victorien abandonné. Nous ne nous doutons pas encore qu’y arriver sera un véritable parcours du combattant. Les tracas commencent lorsque, après avoir pris nos billets, nous nous trompons de quai. Le train part dans 3 minutes, il est environ midi. Je commence à courir, persuadée qu’Andrée me suit. C’est là que je la perds. Le hic, c’est qu’elle m’a affirmé être partie sans son téléphone portable…alors après plusieurs minutes de recherche je finis par demander à ce qu’une annonce soit faite dans toute la gare pour qu’Andrée me retrouve au point d’accueil…sauf que pendant ce temps là elle a pris le train en direction de la ville où nous devons aller pour faire le changement, ce que je finis par savoir en vérifiant mes SMS, car finalement, elle a bien son portable ! Nous finissons par nous retrouver sur le quai de la gare. Une heure de perdue. Toujours dans le rush, je demande à un employé de la ligne où part le prochain train pour Dovecourt, notre destination. Il me dit quai 3 dans 3 minutes. Nous voilà donc dans le train. On commence à se prendre la tête à propos de l’incident, pendant au moins une bonne demi-heure, puis le temps passe, passe, passe…le contrôleur arrive et nous dit qu’on n'est pas dans le bon train ! Stupeur, stress, énervement, il est 14h30, mais le contrôleur est sympa, ne nous fait pas payer d’amende (on a fait l’équivalent de deux fois le trajet prévu) et nous ne nous laissons pas décourager…on refait le chemin inverse et on repart. Avec tous ces contretemps, nous arrivons à Dovecourt à 17 heures !

Selon le plan que nous avons, le manoir se trouve à une bonne demi-heure de marche, il ne faut donc pas lambiner…mais le plan que j'ai imprimé indique une route qui ne s'arrête pas à l'endroit indiqué, le gars de l’auberge du patelin nous dit que c’est la première à gauche alors que c’est la deuxième…Nous sommes à l’orée d’un bois, et il est 18 heures.



On rencontre un type sur la route qui nous dit « oui, Owling Manor c’est à un mile de là, une maison très mystérieuse, il faut passer au-dessus d’une barrière, traverser un champ pour y arriver… », on fait tout ça mais on trouve toujours pas ! Entre-temps, on a couru dans les ronces, les orties, moi stressée de voir la lumière tomber, Andrée plus zen que le dalaï-lama ...elle est d'ailleurs d’une patience exemplaire et je lui décerne une médaille pour me suivre dans cette galère avec le rush que je lui impose…



Puis, une habitante du coin nous dit que c’est la porte d’après sa maison…on grimpe au-dessus d'une barrière, dans la boue et les orties, et on explore un corps de ferme…je me dis que ce sont sûrement les dépendances du manoir…



Mais à part ce vieux piano moisi, rien ne ressemble de près ou de loin à un manoir ici…ce n’est pas la bonne friche ! Nous venons de perdre une heure supplémentaire.


Alors on fait demi-tour, on retente la porte d’en face, redemande aux habitants de la maison d'à côté qui nous disent "vous pouvez pas le rater si vous suivez le chemin bordé de sapins", mais on ne trouve pas le chemin et, à bout de nerfs, crevée, en sang, démangée par les orties anglaises qui sont décidément plus belliqueuses que chez nous, au moment ultime de baisser les bras, le chemin est là sous mes yeux...



Quand nous arrivons Owling Manor, il est 20 heures. Malgré la lumière qui faiblit, nous faisons tout de même un tour rapide, histoire de prendre quelques photos. La maison est beaucoup plus ravagée que ce que j'ai pu voir sur le net. Mais elle reste néanmoins étonnante, de par son architecture biscornue.



Le salon et ses fauteuils jumeaux, au rez de chaussée.



Le puits de lumière au milieu de la maison.



Il est clair que des mômes du coin sont venus faire des fêtes au vu des cadavres de bouteilles que nous avons trouvé, certains s'amusant à faire des mises en scène comme pour accentuer le côté singulier et l'atmosphère glauque de la demeure. Une toile avec un portrait de femme déchiré, un balai de sorcière et une robe noire mitée composent les ingrédients d'un mauvais film d'horreur de série B.



L'un des habitants du manoir était sûrement le peintre qui a représenté cette femme brune au regard étrange sur plusieurs toiles et esquisses trouvées dans la maison. Cette pièce devait être son atelier.



Sur le toit, de nombreuses tourterelles ont élu domicile et ont contribué à ravager le plancher vermoulu du 3ème étage. Le temps presse et il nous faut rentrer...Andrée et moi ne nous imaginons pas une seconde rester dormir cette nuit dans cette lugubre maison et nous décidons de lever le camp. C'est à ce moment-là qu'Andrée se dit inspirée pour chanter a capella une aria dans ce lieu paisible et désolé...



Je filme la scène, comme dans un rêve...la voix d'Andrée s'élève et c'est alors que les ululements des chouettes lui répondent en coeur...il fait presque noir, on ne voit rien mais il nous reste le son de cet interlude bizarre d'un chant "at nightfall" devant un manoir peut-être hanté ! J'avais presque peur qu'Andrée éveille les esprits par son chant puissant et aigu, mais quand la nuit est venue, c'est dans l'apaisement que nous avons pris le chemin du retour. Qui a dit que la musique adoucit les moeurs ? Il faut savoir qu'Andrée observait le jeûne et qu'elle n'avait ni bu ni mangé de la journée...cette femme presque quinquagénaire est surhumaine !

*

J'étais certes frustrée de ne pouvoir explorer plus en détail Owling Manor, mais finalement très contente de ma journée avec Andrée, devenue pour l'occasion une "URBEX* SINGER" plus qu'honorable ! Il ne me restait que ces rares clichés de mauvaise qualité mais les souvenirs étaient là pour pallier à ma déception. A moins...à moins que le sort n'en décide autrement...

TO BE CONTINUED

*Urbex = contraction anglaise de urban exploration (exploration urbaine)

mardi 22 juin 2010

MAISON ABANDONNEE A NAMUR
***
Namur, dimanche 20 juin 2010, 17h45. J’ai une heure ou deux à tuer avant de prendre le train pour Bruxelles à destination de Paris. Mon amie M-E, qui connaît mon goût immodéré pour l’exploration urbaine, me dépose en voiture devant une étrange maison abandonnée à quelques pas du Casino, face à la Meuse.

La vision de ce portail entrouvert, suintant de rouille, ne me dit rien qui vaille et la sinistre maison barricadée à son entrée semble observer les passants de ses yeux étranges, la végétation luxuriante du jardin semblant peu à peu recouvrir sa façade à l'aspect léprosé.

En dépit de l’aspect général peu engageant, je décide pourtant de parcourir les quelques mètres qui mènent à l’escalier de pierre noir recouvert de lierre. Je fais d’abord le tour. Des sacs pleins d’ordures semblent indiquer que la maison était encore occupée depuis peu…peut-être par des squatteurs ?

La maison semble totalement hermétique, mais c’est vers l’arrière, après avoir passé une porte-fenêtre surmontée d’un petit abri vitré en fer forgé et passé quelques ronces, que j’aperçois des vitres cassées offrant une vue peu ragoutante sur une cuvette de WC remplie d’immondices. L’endroit est sombre et sale et, peu rassurée, je commence à me dire que je ferais mieux de me carapater…

Je regagne donc la terrasse côté sud. La véranda en fer forgé accolée à gauche de la maison attire tout particulièrement mon attention. Le silence pesant, ajouté au ciel blafard et au froid, n’invite pas à s’attarder…c’est au moment où je décide de filer que je vois une chaise, que je n’avais pas vue au premier abord, cachée par la végétation. Je grimpe sur la chaise, la fenêtre est ouverte…mon cœur commence à battre un peu plus fort : j’y vais ? j’y vais pas ? La curiosité prend le pas sur le malaise et l'appréhension. Je tapote avec mes ongles la vitre pour voir s’il y a quelqu’un. Pas de réponse. J’entre dans la baraque.

Le plafond et ses moulures s’écaillent, mais la partie la plus belle reste la véranda, avec son carrelage ancien et sa structure en fer forgé. Sur cette photo, on dirait que de grands crucifix rouillés structurent l'ossature.

Quelques tags, des pochoirs aux visages grimaçants témoignent certainement du squat et des fêtes clandestines organisées par des ados en mal de sensations fortes, faisant écho à ce masque blanc fantômatique suspendu au dernier étage, à peine éclairé par la lumière des combles.

Pochoirs de pochtrons...

Au bas de l’escalier en bois qui conduit aux trois étages, la présence d'un monte-escalier trahit l’état de l’occupant précédent, sans doute une personne invalide et âgée au vue de l'ancienneté des tapisseries. L’atmosphère dans cette maison est assez pesante, voire étouffante.

En réalité, l'endroit est beaucoup plus sombre.

Au rez-de-chaussée, la maison est plongée dans une quasi-obscurité, certaines pièces baignant dans le noir le plus total. Je n'ose pas m'y aventurer, laissant avec frustration derrière moi quelques portes closes. Au cours de ma visite, je marche très lentement et respire à fond de pièce en pièce, guettant le moindre bruit comme pour ne pas réveiller d'hypothétiques entités invisibles.

Des plantes parasites, toiles d'araignées, cadavres de bouteilles vides, tas de déchets, boîtes de conserve rouillées, morceaux de miroirs brisés, quelques vestiges de papier et de tissus souillés constituent le décor apocalyptique et désolant d'une demeure dont la pestilence a remplacé toute trace d'humanité.

Ma seule rencontre avec un être vivant restera celle de ce chaton poussiéreux découvert au grenier, dont le regard triste m’a serré le cœur.

Au fil de mes explorations, je me demande toujours ce qui peut justifier l’abandon d’aussi belles demeures. Dans ce quartier résidentiel d’une des plus belles villes wallonnes, cela paraît incroyable. Je ne peux m’empêcher de penser que seul un drame peut expliquer le fait que la maison n’est pas à vendre et que personne ne semble s’en soucier. En effet, aucun panneau n’indique qu’il s’agit d’une propriété privée, pas de trace explicite non plus d’interdiction d’entrer ou d'avis de chantier…Fantasme ou réalité ? La porte d’entrée de la maison a des yeux…comme celle d'Amytiville. Les planches qui la musèlent continueront sans doute de préserver ses secrets pour longtemps...à moins que quelqu'un qui passe par là ne lève le voile...l'appel est lancé !

lundi 31 mai 2010

LE PAPE DES POUPEES

Trop de choses à gérer en parallèle de ce blog font que ce dernier tourne au ralenti ! L’occasion pour moi de refaire surface ici se présente puisqu’avec la sortie officielle du livre de Gérard Lavalette aka Le Piéton de Charonne et le vernissage de son exposition ce soir à la Mairie du 11°, il m’est permis de publier un avant-goût de ce que renferme l’ouvrage. Au programme, des photos du fameux Piéton du 11ème, assortis de textes pour les légender. Je remercie par là-même celui que j’appelle « Géhel » de m’avoir proposé de poser une pierre à son édifice, fruit d'années de déambulations et rencontres parisiennes inspirées. Voici le texte écrit pour lui en illustration d’une photo qui m’a profondément intriguée…je suis passée devant cette boutique il y a peu - avenue Parmentier - elle était fermée, mais j’espère bien papoter un peu un jour avec Henry Launay pour voir si mes « intuitions textuelles » à propos de ce personnage hors du temps ont été les bonnes. Une autre photo de Gérard ici.

Le montant de la vente de livre sera intégralement versé à l’association «La photothèque des jeunes parisiens – Parimagine ». D'autres auteurs ont contribué à accompagner les photos de Gérard, je vous invite à aller les découvrir...

Au milieu de ses ouailles rustiques et démantibulées, le Pape des Poupées semble veiller sur elles comme sur ses propres chérubins : dans son cabinet de curiosités, il fait de la chirurgie plastique…Peut-il aussi réparer un cœur brisé ? Lui suffit-il d’un coup de tournevis pour lui rendre sa vertu ? J’aime à croire que sa mécanique fait palpiter l’âme de ces clones miniaturisés, tant de fois rêvés par les petites filles, aussi sûrement que leurs faces burlesques renferment les visions d’horreur d'un lieu imaginaire peuplé de fantômes. Dans cet enchevêtrement de membres nus, des têtes de guingois empilées sur les étagères fixent de leur œil de plexiglas le comptoir de la boutique. Elles appartiennent à des mannequins de résine victimes de la mode d’une époque ; russes, elles s’imbriquent les unes aux autres comme les pièces d’un puzzle : le corps de l’humain et ses facettes ; vaudous, leur peau factice est piquée pour épingler à petit feu leurs doubles vivants.
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Toute cette bimbeloterie s’expose en pièces éparses, reliques emplies des mots d’un passé mystérieux qui, sous la houlette de l’artisan rompu à leurs rouages, continuent de vivre à travers tous les âges. Absorbées dans une espèce de mutisme obstiné. Elles me font penser à des poulpes lisses, dont le pouls se grefferait sur celui du môme qui les serre contre son cœur. Ce même môme, devenu adulte, se souviendrait peut-être des soins et de l’affection qu’il a porté à ses doudous devenus chair et sang sous les traits de ses propres enfants. Tantôt objets déco, tantôt objets d'égo, ces jouets immémoriaux évoquent à la fois la cave et le vieux parfum, le tissu mité et le bois qui craque, les secrets de famille et les bris de porcelaine, imprégnant l’étrange officine d’une poudre au goût d’éternité.
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mardi 6 avril 2010

THE SLIPPER SLEEPER
(La dormeuse aux chaussons)

Ce texte s’adresse particulièrement aux lecteurs qui ont des notions d’anglais. Certains mots d’une langue à l’autre peuvent être (plus ou moins) homophones, sans pour autant signifier la même chose. Ce texte est farci de double-sens, avec un champ lexical axé sur la charcuterie qui n’échappera pas aux couteaux les plus aiguisés.
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Six heures du matin, je sors d’un pub londonien bondé. Je suis un peu sous low après avoir vidé mon bag en toc dans un bock en tags. Je cherche le nom de la rue, en plein lack des signes sous la pluie qui sème des flacks en série. Perdue et titubante, je trébuche sur un nid de pools et tombe dans une trap. Sur le point de me hisser hors du true, je vois une main de caoutchouc tendue vers moi et accepte laid. Mais me voilà nez-à-nez avec un éboueur couvert de boo, nettoyeur en glaise à la face aussi grease que Jack le Ripeur. En état de choke, je commence à faire un bad tripes. Et si ce gars-là était un cooper de têtes ? Un éventreur pervers made in en glandes ? Ca devient show bouillant. La panique me get, aussi je m’exhorte intérieurement au flegme (so british). D’abord, je repair un panneau susceptible de m’indiquer une artère correcte…ah wee-wee, j’en vois un noté « Highgate »…si la flesh est bone, c’est que le bon corps y dort. Je commence à courir, mais mon sale ami me poursuit ! Je file (bien évidemment à l’anglaise) tout en pleurant des saucissons à l’eye et, pour ajouter à mon vague à l’ham, mon sac qui s’est hoover dans ma course laisse échapper des liasses de biftons cornés de bifs sur le mack à dames qui me court appraise ! Je nose pas faire demi-tour pour les ramasser, flairant le danger d’un contretemps. A ce train là, si je perds tout par morceaux il ne me restera pas un seul petty bout d’chair qui ne me serve là au point de ressembler à une squelettique belle fée gore. Gémissante sous le flow de mes larmes, je ne vaux pas mieux que Couine Mum…c’est sûr ça casse le meat ! Avec Jack le Ripeur à mes trousers, il ne me reste plus beaucoup d’alternatives avant de trépasser au peak à glass ou sous une lame du steel tranchant ! J’ai désespérément besoin dead, mais à setter indue il n’y a pas un chat. Soudain, sur la place d’une église, j’aperçois un monticule de charentaises multicolores ! J’y plonge et m’y love en des-pair(es) de cause puisque je suis déjà dans les shoes… et ça marche de jouer à cash-cash avec un décor qui leurre : c’est la lumière du soleil au zénith qui me prend en flagrant daily de sommeil, alliée à la toccata provenant de l’église, qui passe dans mes organs auriculaires comme Bach à la mess. Un œil à droite, un œil à gauche, la root est libre et je peux tranquillement rejoindre l’home de ma vie.
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(MINI GLOSSAIRE ANGLAIS : appraise = évaluer, bad trip = intoxication, bag = sac, bone = os, boo = huée, butcher = boucher, chap = gars, choke = étrangler, come back = retour, cooper = tonnelier, corned beef = bœuf salé ; corridor = couloir, daily = journalier, dead = mort, despair = désespoir, England = Grande Bretagne, eye = œil, flack = attaque, flesh = chair, flow = écoulement, get = posséder, glass = verre, grease = graisse, ham = jambon, Highgate = cimetière à Londres, home = maison, hoover = aspirateur, killer = tueur, lack = manque, laid = couché, love = amour, low = faible, mack = coucher avec qq, meat = viande, mess = désordre, nose = nez, organ = orgue, peak = pic, petty = insignifiant, pool = lac, Queen Mum = la Reine d’Angleterre, repair = réparer, root = racine, setter = chien d’arrêt anglais, shoes = chaussures, show = spectacle, steel = acier, trap = piège, trousers = pantalon, true = véritable, wee-wee = pipi). En FRANCAIS, ripeur = éboueur.

Je me demandais ce que j’allais bien pouvoir utiliser comme visuel pour illustrer ce texte…et je tombe en arrêt devant une vitrine en passant dans la galerie Montpensier. Si cette installation m’a fait rire, me replongeant soudainement dans une partie de Cluedo où le Colonel Moutarde trucide Melle Rose avec la clé anglaise dans la véranda, elle en a rebuté certains qui ont trouvé l’idée tantôt horrible, tantôt cocasse… « Ah, on ne sait plus quoi faire de nos cadavres de nos jours », s’est esclaffé l’un d’eux. « Chatouille-lui les pieds pour voir si ça bouge », a dit un autre. L’artiste, Kirke Kangro, est une jeune estonienne qui m’explique dans un anglais teinté de slave qu’elle s’est attachée à retranscrire les sentiments paradoxaux évoqués par le titre «Home and Uncanny». « Home » pour le côté familier et sécurisant de la paire de chaussons, « Uncanny » pour son côté bizarre lorsque cette paire de chaussons apparaît dans un contexte déshumanisé, décontextualisé. C’est un peu le sentiment qu’on éprouve lorsqu’on explore les friches ou les maisons abandonnées, dans lesquels on trouve des objets ayant appartenu, ayant été portés, par des inconnus.

J'ai désaturé la photo que j'ai prise de l'installation de Kirke Kangro
"Home & Uncanny", jusqu'au 28 avril 2010, dans le cadre du concours Palais-Royal Openair
@ Peter's friends, 25 galerie Montpensier - Paris 1er
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"Uncanny", c’est la fameuse « inquiétante étrangeté », le Unheimlich décrit par Freud. Cela me rappelle justement une photo que j’avais prise dans les combles d’un sanatorium abandonné, d’où se dégage une impression de malaise :

Petite Cendrillon, 5 sept. 2009
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Le chaos de la pile de charentaises recouvrant un mannequin dont on ignore s’il représente un cadavre dissimulé ou une personne endormie, le tout accentué par l’ambiguïté même de sa position allongée est frappant. De même, cette sandalette et ces quelques épingles à linge dans un grenier racontent une histoire, charge à notre imagination de nous la raconter.

mercredi 3 mars 2010

REFLEXIONS FAITES & CARRES D'HONNEUR

Depuis que je parcours les friches, mon regard s’est transformé, au point de scruter partout lumière et matières. Une goutte d’eau, un mur lézardé, une poignée rouillée ou un sol moussu peuvent en un clic se transformer en sujets poétiques, et les photographes sont nombreux à traquer ces détails qui rendent les textures si intéressantes. Cela fait un petit moment déjà que mon oeil se porte sur les reflets, et plus particulièrement les flaques. Ce n’est peut-être pas très original ; d’autres en font déjà depuis longtemps leur sujet de prédilection. Notamment, je vous conseille de visiter le site de Robin Soulier, expert es reflets aqueux…Pour ma part, je vous propose une série de 10 photos de reflets au format carré…certaines y incluent des peintures. Pour moi, ces photos sont une mise en abîme d’œuvres offertes, ou bien une réalité noyée dans un ailleurs fait de morceaux d’objets disparates, composants eux-mêmes d’une photo-peinture.

1. Les "Aquarelles"

Eclaircie



Coques de mousse

Salle des pas perdus

Bleu amiante

Ciel chargé
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2. Les "Graffs"

SNIL (LF)

16T CREW
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Puisqu’on parle de format carré : actuellement à Confluences, j’expose une photo dans le cadre du solo show de RERO à Confluences (Maison des Arts Urbains) - 190 bd de Charonne 75020 PARIS jusqu'au 3 AVRIL 2010. Cette photo est un témoignage d'une session au cours de laquelle un sympathique groupe de airsoftballers a accepté de prendre la pose devant le lettrage de l'artiste...la négation de l'image est au centre du travail de RERO : son site ici avec d'autres photos !

Et toujours au format carré (décidément cette figure me poursuit !), sortie du livre de SEIZE HAPPYWALLMAKER chez Opus Délits …ma photo reflet de son graff (voir ci-dessous) a été sélectionnée par Critères pour l'édition de cartes postales promotionnelles distribuées gratuitement, et si vous trainez en librairie street art à compter du 17 mars, vous pourrez y lire en préface un poème écrit tout spécialement pour SEIZE. Ce tome 8 est signé Patrick Le Fur (format 15 x15 cm, 60 pages) et vous pouvez également l'acquérir en ligne.

A voir également : l’album REFLETS chez Oeildetat.